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lundi 11 juillet 2011

Millenium

J'ai fini hier le troisième tome de Millenium. Je suis content que ce soit le dernier, j'ai dû m'y reprendre à deux fois.

Il y a du Luc Besson chez Stieg Larsson. Il y a d'abord l'histoire, efficace mais un peu courte, qu'on délaye dans un fatras d'intrigues secondaires pour arriver au format désiré. Il y a ensuite les personnages, tellement étranges et hauts en couleur qu'il est difficile de leur donner un caractère crédible et un peu d'épaisseur. Après trois tomes de 700 pages, on s'aperçoit qu'on ne connait pas vraiment mieux les héros qu'à la fin du troisième chapitre du premier volume. Mais il y a aussi, comme chez Besson, un véritable talent qui fait qu'on ne s'ennuie pas, qu'on continue chapitre après chapitre, même si on se doute qu'on sera un peu déçu à la fin, et qu'on n'est en présence ni d'un grand roman, ni d'un grand film...

En fin de compte, cela donne l'impression d'une oeuvre un peu paresseuse, qui part d'une bonne intrigue (une enquête sur une disparition ancienne), et d'un personnage étrange (Lisbeth), mais s'essouffle assez vite, parce qu'à défaut de creuser ses personnages et les histoires, Larsson se lance dans une surenchère de personnages (notamment de méchants) de moins en moins crédibles.

Au fil des volumes, les situations et les personnages "normaux" disparaissent, pour laisser la place à une galerie de monstres en bocal, de Zalachenko à Niedermann, en passant par Clinton et Gullberg, qui évoluent dans un décor minimaliste. Le rôle des protagonistes (Mikael et Lisbeth) se réduit de plus en plus. Dans le troisième tome, ils agissent à la façon d'un "narrateur dans l'histoire", qu'on regarde découvrir les évènements racontés au chapitre précédent.

Et tout ceci est dilué dans une série de faits divers (le travail d'Erika, les enquêtes de Millenium, le chirurgien et Lisbeth) sans grand intérêt parce que très convenus.

Autre aspect que j'ai trouvé agaçant, le côté moralisateur. Dans les trois romans, les gentils sont bohèmes, libertaires et bisexuels (ou à tout le moins polyamoureux), les méchants sont bourgeois, homophobes et sexistes. Cette morale victorienne à l'envers surprend, voire charme, au début, mais se révèle rapidement aussi convenue et ennuyeuse que ce qu'elle prétend critiquer.



On y trouve peut être une leçon sur l'écriture. La tentation de mettre en scène des personnages exceptionnels, ou des évènements incroyables, est toujours grande. Mais, à moins d'avoir énormément de talent, il faut y résister, sous peine de voir les personnages et les évènements cannibaliser l'oeuvre...

Mais bon, si vous ne l'avez pas fait, lisez Millenium, le premier volume au moins. C'est au roman ce que les films avec Bruce Willis sont au cinéma, et moi j'aime bien Bruce Willis.