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mercredi 4 août 2010

Les excités

There is no greater community of spirit than that between the artist and the listener at home, communing with the music. (Glenn Gould)

L'idée romantique que l'on se fait de l'artiste, habité par son oeuvre, ayant l'air d'un fou, en musique, ca donne quelque chose comme cela...
Lang Lang
Kissin

Ce ne sont pas de mauvais pianistes, et je n'ai pas eu de mal à trouver ces exemples : presque tout le monde fait ça, de nos jours.

Ca n'a pas toujours, forcément, été le cas. Voici Rubinstein (jeune), dans le même morceau.

Vous avez vu? il ne gesticule pas, il ne lève pas les yeux au ciel, il ne fait pas de grimace. Et pourtant, ça "fonctionne".


Dans le même genre, voici Furtwangler dirigeant l'ouverture de Don Juan, et voici James Levine

On imagine aisément que pour diriger cela, il faut faire de grands gestes. Furtwangler prouve le contraire: sa version, peu spectaculaire à regarder, est pourtant nettement plus dramatique, plus "grande", que celle de Levine.

On pourrait multiplier les exemples, auxquels il faudrait ajouter les versions "scénarisées" comme celle ci (avant, j'adorais cette chanson et j'adorais Bostridge, mais depuis que j'ai vu cela, je n'arrive plus à les prendre au sérieux...)

Alors pourquoi? Pourquoi tout ce kitsch, ces clips adolescents, ces gesticulations qui évoquent André Rieu et Richard Clayderman? La musique classique rebute, parce qu'elle est (dit on) difficile d'accès, la rendre ridicule ne va pas l'aider...


Au fond, peut être que Gould avait raison, qui pensait que le disque, plus honnête, rendrait le concert inutile. Aujourd'hui, si l'on veut écouter de la musique, concentré, dans les meilleures conditions possibles, il faut rester chez soi, et mettre un disque. Le son sera meilleur, il n'y aura pas de fausses notes, pas de toux ni d'éternuement.

Pourquoi, alors, aller au concert? Peut être, pour le spectacle, pour voir les artistes gesticuler. Et comme les salles sont grandes, il faut en faire des tonnes, pour que tout le monde puisse bien voir. En fin de compte, la musique, et la qualité de ce qu'on entend, n'est pas le plus important (de toutes facon, on aura mieux à la maison).

Ceci expliquerait cela...

Il y a au début de Fitzcarraldo une scène étrange, où l'on voit Caruso et Sarah Bernhardt se produire dans un opéra. Comme elle ne pouvait pas chanter, elle joue en playback, pendant qu'une vraie chanteuse se produit dans la fosse, avec l'orchestre. Peut être est ce l'avenir du concert classique...

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